vendredi 25 mai 2018

La chaleur sans orage : les dégradations "silencieuses"

Dans l'imaginaire des gens, un temps chaud, surtout s'il est lourd, se finit par des orages plus ou moins violents. Pourtant, il arrive très régulièrement que de telles journées insoutenables soient suivies le lendemain par un temps bien plus agréable, voire mauvais, le tout sans grabuge. Au mieux l'observateur attentif aura vu l'un ou l'autre éclair dans le lointain, accompagné de quelques gouttes, au pire le temps sera resté absolument sec et seuls quelques nuages décoratifs et quelques rafales auront signalé le passage du front froid, accompagné irrémédiablement d'une chute des températures.

dimanche 6 mai 2018

2018: un été très chaud et très sec

Cet article relate le déroulé de l'été climatologique 2018 en Belgique et dans le nord de la France. Celui-ci a été marqué, notamment dans ses deux premiers tiers, par un temps chaud et très sec, avec une double canicule fin juillet et début août, suivie d'orages localement virulents. Alors que 2003 a longtemps tenu la palme, c'est maintenant à 2018 qu'il faut se référer lorsque l'on évoque le potentiel thermique maximal d'un été dans nos régions... jusqu'au prochain record.

Orages diluviens et inondations du 1er juin

Pourtant, au premier jour de l'été climatologique, rien n'indique qu'il va être sec et chaud. Une grande partie de l'est de la Belgique est concernée par un système pluvio-orageux étendu (MCS en anglais) arrivé d'Allemagne en fin de nuit. Il se caractérise par une masse de pluies durables (dites stratiformes) au sein de laquelle se sont individualisés quelques noyaux orageux très actifs. Ce système s'est décomposé sur la Belgique dans l'après-midi.

 Activité électrique relevée entre minuit et midi le 1er juin (source: Lightningmaps).

L'étendue et le très lent déplacement de ce système ont mené à des relevés pluviométriques impressionnants, voire exceptionnels pour certains d'entre eux:

Saint-Vith: 95 mm (dont 64 en une heure)
Butgenbach: 93 mm
Battice: 89 mm
Chaineux: 88 mm
Vielsalm: 71 mm
Robertville: 64 mm
Herve: 62 mm
Jalhay: 61 mm
Waremme: 59 mm
Vaux-sous-Chèvremont: 59 mm
Elsenborn: 58 mm
Slins: 55 mm
Ternell: 54 mm
Lanaye: 46 mm
Ouffet: 44 mm
Mont-Rigi: 44 mm
Louveigné: 43 mm
Oupeye: 42 mm

Le MCS sur l'Allemagne en fin de nuit (source: Kachelmann).

 Le MCS en décomposition vers un amas pluvio-orageux, avec quelques noyaux très actifs, notamment sur Liège (source: Belgocontrol).

Stagnation sur la Belgique de l'amas pluvio-orageux en milieu de matinée (source: IRM).

L'importance et la durée de ces pluies ont mené à de nombreux débordements et inondations rapides dans les régions de Liège, Verviers, Spa, Vielsalm et du Pays de Herve, où les pompiers ont du intervenir de nombreuses fois. Par endroits, le niveau de l'eau a dépassé 1,5 mètre dans les rues. Par la suite, les bassins hydrographiques de l'Our et de la Vesdre sont entrés en alerte crue, tandis que ceux de l'Amblève et de la Basse Meuse étaient placé en préalerte suite à la montée des eaux.

La région de Vielsalm a été fortement touchée par les inondations (auteur: R. Bodeux via 7fm).

La situation atmosphérique était propice à la formation d'orages pluvieux. Une petite dépression sur l'Allemagne entretenait sur l'ouest de ce pays et la Belgique un flux d'ouest moite dans les basses couches, tandis qu'en altitude on notait un flux rapide de sud-est, avec une divergence génératrice d'une ascension de l'air humide plus bas. Les orages se sont formés dans l'instabilité et les convergences initiées par la dépression sur l'Allemagne, et ont ensuite lentement voyagé vers la Belgique avec le flux d'altitude. Même à l'écart des convergences de basse couche et de l'instabilité, le système pluvio-orageux a sans doute pu s'entretenir grâce à la divergence en altitude et le flux d'ouest bien humide à basse altitude.

Après quelques orages en première décade, la suite du mois est calme: les journées grises alternent avec les plus lumineuses, le tout sans pluie ou presque, accentuant le déficit pluviométrique sur le centre du pays. La fin du mois est très ensoleillée et chaude.

Le début de l'été "civil" est par contre assez frais: les températures peinent à dépasser les 20°C le 21 juin. Au petit matin du 22, il ne fait que 3,5°C à Saint-Hubert, 6,4°C à Gosselies et 7,1°C à Bierset. On note à peine 1°C à 1500 mètres d'altitude, montrant la froideur de la masse d'air sur une bonne partie de la basse troposphère. Les températures remontent par la suite.

Au 30 juin, en plus des premiers 30°C en certaines stations du pays ce jour, l'absence de précipitations pose question, notamment sur le centre du pays où les deux derniers mois ont été très pauvres en pluie. Le mois de juin présente à Uccle, et comme en mai, un déficit pluviométrique exceptionnel. Globalement, la situation est moins remarquable sur une bonne partie est du pays en raison des orages de mai et de tout début juin. L'absence de pluie semble alors amenée à se poursuivre encore un moment étant donné les prévisions pour début juillet qui voient se maintenir de puissants anticyclones sur ou au nord de nos régions, rejetant les dépressions loin sur l'Atlantique ou vers la Méditerranée.

Bilan du mois de juin (source: RTBF sur base des données de l'IRM pour Uccle).

Juillet commence sur le schéma entrevu: (très) chaud, sec et ensoleillé. Les seuls nuages admis ne font que décorer ou flamboyer les crépuscules. Le 3, il fait de 28 à 31°C dans la plupart des stations du pays.

Superbe crépuscule sur le Namurois le 3 juillet, après une nième journée estivale (auteur: Le Chroniqueur météo).

La sécheresse tend à s'auto-entretenir, dans la mesure où l'air très sec désactive les perturbations d'ouest qui ne donnent souvent que des nuages et quelques gouttes, tandis qu'elle contrecarre également le développement des nuages orageux. Il faut en effet beaucoup d'énergie et une forte instabilité pour arriver à former des orages dignes de ce nom dans cet air très sec, et compte tenu de cette énergie, ils sont directement conséquents, comme le lendemain.

4 juillet - orages intenses des Hauts de France à la Wallonie

Ce jour est marqué par des orages parfois très actifs. Quelques foyers locaux éclatent entre le début de la matinée et la fin de l'après-midi, avec une intensité généralement faible à modérée (Ardenne, Famenne, Namurois...). En toute fin d'après-midi, des orages plus intenses frappent la Lorraine belge, et notamment Arlon, avant de remonter vers la région de Bastogne. En parallèle, on note des foyers également actifs entre Lille et Valenciennes, ainsi que de l'Avesnois et la Thiérache à la Lorraine.

Par la suite, c'est un fort orage multicellulaire qui se développe sur le Condroz namurois, avec de fortes précipitations génératrices de quelques débordements, localement de la grêle, des rafales soutenues et une puissante activité électrique (un éclair toutes les quelques secondes).

L'orage multicellulaire du début de soirée sur l'est de la province de Namur (source: Kachelmann).

En milieu de soirée, un nouvel orage multicellulaire se développe sur l'est du Hainaut et gagne le nord-ouest de la province de Namur et le Brabant wallon, avec une activité similaire. Des inondations sont observées localement dans la moitié ouest du Brabant wallon. Quelques derniers orages, généralement faibles, sont observés dans le nord de la province de Liège en début de nuit.

 Avancée de l'orage multicellulaire du début de soirée sur la région de Gesves, au sud-est de Namur (auteur: Le Chroniqueur météo).

Eclair internuageux sous le second orage multicellulaire en soirée sur la région de La Bruyère, au nord-ouest de Namur (auteur: Le Chroniqueur météo).

Au final, les foyers ont concerné pas mal de régions, apportant une pluie bénéfique pour les sols après des semaines de sécheresse. Par endroits, ces précipitations ont été assez abondantes, avec par exemple 38 mm de pluie à Lasne dans le Brabant wallon, (Meteo Belgique), 32 mm à Rochefort (SPW) et 42 mm à Ciney (SPW) en province de Namur. Voir aussi l'article de Belgorage.

Activité électrique observée le 4 juillet, avec les impacts les plus récents en jaune (source: Lightningmaps).
 
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Les deux semaines qui suivent sont chaudes et ensoleillées. L'après-midi du 15 juillet, des orages locaux mais parfois soutenus éclatent en Ardenne et en Lorraine belge. De la grêle est signalée par endroits. Pendant ce temps ailleurs, la sécheresse s'accentue, et notamment dans le Hainaut.

Au sens de la définition de l'IRM (minimum 5 jours à plus de 25°C, dont minimum 3 à plus de 30°C), la période allant du 13 juillet au 7 août est une vague de chaleur d'une longueur exceptionnelle, parmi les plus durables que le pays ait connu. Elle englobe deux pics de canicule particulièrement intenses.
 
24 - 27 juillet: canicule et orages épars

La dernière décade de juillet, en plus de la sécheresse, est marquée par une canicule remarquable, voire exceptionnelle par endroits. Ce coup de chaud est lié à la persistance d'un puissant anticyclone d'altitude sur la Scandinavie (il s'y trouve depuis un moment) et à la plongée d'une dépression sur l'Atlantique, orientant un flux d'air très chaud d'origine tropicale sur nos régions (20°C à 850 hPa - 1550 mètres d'altitude).

Géopotentiel à 500 hPa et pression au niveau de la mer le 27 juillet à 2h00 (source: Meteociel).

Le 24 juillet est la première journée réellement chaude, et aussi la première de l'année au cours de laquelle Uccle atteint les 30°C, preuve s'il en est que le temps chaud que nous connaissons depuis deux mois est plus interminable qu'intense. On note 33,0°C à Angleur, 32,2°C à Hastière, 31,4°C à Gosselies, 31,3°C à Ernage et 30,9°C à Uccle. Dans le nord de la France, les températures sont tout aussi élevées avec 31,6°C à Saint-Quentin, 32,0°C à Lille et 32,4°C à Charleville-Mézières. La nuit suivante est chaude, en plusieurs stations le mercure ne descend pas en-dessous de 20°C.

Le 25 juillet, les températures sont plus élevées: 35,0°C à Angleur, 32,8°C à Uccle, 32,6°C à Gosselies, 32,3°C à Ernage, 32,2°C à Dourbes, 32,6°C à Saint-Quentin, 32,8°C à Lille et 34,0°C à Charleville-Mézières. Malgré l'air sec des basses couches, quelques orages éclosent ça et là dans l'après-midi, avec des bases nuageuses très élevées (Hesbaye, Entre-Sambre-et-Meuse, Condroz et Ardenne dans une moindre mesure). Une petite zone de convergence assez mal définie semble en être à l'origine.

Le 26 juillet est encore plus chaud et voit quelques stations égaler ou établir un nouveau record absolu de température (c'est le cas notamment de Zaventem et de Beauvechain). On relève 36,2°C à Angleur, 34,3°C à Bierset, 31,7°C à Saint-Hubert, 35,4°C à Uccle, 35,7°C à Beauvechain, 35,9°C à Gosselies, 36,4°C à Hastière, 35,1°C à Florennes, 35,9°C à Dourbes, 35,4°C à Ernage et 33,9°C à Buzenol. En France, on note 32,1°C à Boulogne, 35,7°C à Lille, 36,2°C à Saint-Quentin et 36,6°C à Charleville-Mézières. 

Une nouvelle fois, malgré de l'air sec (l'humidité relative est inférieure à 20 % en de nombreuses régions), des orages faibles à modérés éclatent ça et là, notamment du côté de Liège où de la grêle est signalée. En fin d'après-midi, Bruxelles et Charleroi connaissent chacune un orage assez fort, avec de la grêle. La foudre frappe deux maisons dans le nord de Charleroi, et une rafale de 91 km/h est relevée à l'aéroport de Zaventem. On note également quelques impacts à l'ouest de Lille et un orage assez actif concerne l'Avesnois et la Haute Sambre en soirée.

A nouveau, une convergence assez mal définie pourrait avoir contribué à l'organisation de ces orages. Il tombe 30 mm de pluie à Uccle, menant ça et là à quelques débordements.

Comme régulièrement ces dernières semaines, ces orages se forment en raison de la surchauffe des basses couches (30 à 35°C au sol, 18-20°C vers 1500 mètres) qui engendre un différentiel très élevé avec l'altitude. Cette instabilité prononcée permet aux nuages orageux de se constituer malgré l'air sec au départ des ascensions formant ces nuages. Ceux-ci ont alors une base très élevée (parfois 3, voire 4 km au-dessus du sol, nos régions étant habituées à moins). Par ailleurs, cet air sec permet au ressenti de ne pas être trop désagréable malgré les fortes températures.

L'orage de Charleroi, vu depuis le nord-est de Namur. L'air sec en basse couche permet à la base du cumulonimbus d'être très élevée et d'être ainsi visible de très loin (auteur: Le Chroniqueur météo).

La nuit du 26 au 27 est exceptionnellement douce, avec des minimales qui ne descendent pas en-dessous de 24,0°C à Bierset et 22,6°C à Beauvechain.

Le 27 juillet est thermiquement similaire à la veille, mais aussi la dernière journée de la canicule. Un front froid approche par l'ouest, précédant des courants maritimes moins chauds. L'après-midi, on relève 35,4°C à Uccle, 35,9°C à Gosselies, 35,1°C à Dourbes et à Ernage, 35,8°C à Bierset, 33,5°C à Buzenol, 31,7°C à Saint-Hubert, 37,0°C à Kleine-Brogel et 38,2°C à Gand. Une bulle d'air très chaud concerne la région lilloise avec 37,6°C. Saint-Quentin monte à 35,9°C et Charleville à 35,5°C.

Dans l'après-midi, à l'instar des jours précédents, l'instabilité est suffisante pour générer des orages épars sur le sud et l'ouest du pays. Un orage assez fort se produit entre Charleroi et Waterloo, avec localement de la grêle. En soirée, l'approche du front froid précédé de lignes de convergence génère une série d'orages localement forts qui remontent du nord de la France sur l'extrême ouest du pays. Un autre orage local éclate sur la Hesbaye.

La nuit suivante et tôt le lendemain matin, le front avance sur le pays, donnant encore l'un ou l'autre faible orage ça et là. Pour autant, de nombreuses régions sont restées au sec, et la sécheresse se fait sentir sur l'état de la végétation en plusieurs endroits du pays. Des feux de champs sont signalés depuis plusieurs jours en plusieurs localités.

Le Brabant wallon prend des airs de maquis, comme ici à Bierges le 28 juillet (auteur: F. Riguelle).

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Sans surprise, le mois de juillet qui se termine a été très anormalement chaud et ensoleillé. Si côté précipitations, l'anomalie à Uccle n'est pas exceptionnelle grâce aux quelques orages, elle est spectaculaire dans certains coins du pays où pratiquement aucune précipitation n'aura été observée pendant le mois! 

2 - 7 août: seconde canicule

La première décade d'août est à nouveau marquée par une période de très fortes chaleurs. Un puissant anticyclone se constitue sur nos régions et rejette les dépressions et le flux maritime plus au nord. Une seule faiblesse de celui-ci permet à un petit front froid de basse couche de s'infiltrer en soirée du 4, apportant de l'air maritime un peu moins chaud qui maintient les températures sous 30°C le 5 (sauf en Lorraine). Ce petit front n'apporte que quelques nuages, pas mal de vent mais aucune précipitation. 


Le 6 août, les températures repartent à la hausse et dépassent les 30°C en de nombreux endroits. On mesure 32,8°C à Chièvres, 33,0°C à Uccle, 33,9°C à Gosselies, 33,7°C à Ernage, 33,6°C à Bierset et 32,0°C à Buzenol. En France, on mesure 33,3°C à Lille et à Saint-Quentin, 34,7°C à Charleville.

Le 7 août est la journée la plus chaude. Les maximales atteignent 35,6°C à Chièvres, 34,8°C à Uccle, 35,1°C à Gosselies, 35,0°C à Ernage, 35,5°C à Bierset et 34,6°C à Buzenol. Il fait aussi 35,4°C à Saint-Quentin, 36,0°C à Charleville-Mézières et 36,1°C à Lille. L'air est à nouveau très sec ces jours, et si les températures sont élevées, le ressenti n'est pas trop invivable en raison de l'air sec. Vers 15h00, on mesure à peine 17 % d'humidité relative à Beauvechain, ce qui n'est pas loin des records connus en Belgique.

Nuit du 7 au 8 août: orages parfois violents

La nuit du 7 au 8 est marquée par une forte dégradation orageuse, la plus étendue de cette année jusqu'à présent pour la Belgique. Elle se produit de manière assez classique d'un point de vue atmosphérique avec l'approche d'un front froid précédé d'une ligne de convergence des vents, le tout venant buter sur une masse d'air très chaud sur nos régions et dont l'instabilité est croissante. En altitude, on note une petite divergence des flux, forçant l'ascension des masses d'air.

Une caractéristique particulière toutefois sera à nouveau les bases très élevées de ces orages en raison de l'air sec en basse couche (il s'est à peine humidifié quelques heures avant la dégradation), donnant des orages "planant" en l'air et semblant enfermer au sein des nuages orageux la plupart des éclairs (activité intranuageuse). 

Analyse de surface du 8 août à 2h00 avec la convergence en rouge gras (source: KNMI).

Après quelques orages sur l'Aisne et près de la Botte du Hainaut en début de soirée, plusieurs salves orageuses concernent la Belgique et le nord de la France pendant toute la nuit suivante, certaines sont localement violentes. Avant leur arrivée, l'air est encore très chaud, avec des températures qui sont encore proches des 30°C dans plusieurs stations.

Un premier MCS (système orageux de grande étendue) se constitue entre Pas-de-Calais et Nord côté français vers 22h30 puis entre sur la Belgique par la région de Tournai vers 23h00 et se déplace jusqu'à la province d'Anvers. Il s'accompagne d'une forte activité électrique et de puissantes rafales (localement 90 - 100 km/h). 

En parallèle, plusieurs cellules orageuses se développent vers 23h30 sur les départements de l'Aisne et des Ardennes et gagnent les provinces de Namur et de Luxembourg en se constituant en un amas orageux. L'activité électrique y est également soutenue (un éclair toutes les quelques secondes par cellules) et un des orages provoque des dégâts liés au vent dans la région de Florennes. Cet ensemble s'affaiblit en atteignant la province de Liège vers 1h30.

Eclair internuageux sous la deuxième salve orageuse, vu depuis les hauteurs de Dinant en direction du sud (auteur: Le Chroniqueur météo).

Vers 0h45, un troisième amas orageux entre sur le Hainaut au niveau du Borinage. Il subit une phase d'intensification en évoluant vers un bow echo (ligne orageuse en arc) générateur d'une forte activité électrique et de rafales (autour de 80-100 km/h). Il traverse ainsi le nord-est du Hainaut puis le centre du pays avant de gagner l'est de la province d'Anvers et le Limbourg en s'affaiblissant.

Peu après 2h00, de nouvelles cellules se développent de la Botte du Hainaut au département des Ardennes. En progressant sur la province de Namur et le Brabant wallon, elles forment un amas orageux assez peu organisé mais constitué de foyers parfois très actifs avec de fortes précipitations et un éclair toutes les quelques secondes, notamment sur l'est de la province de Namur et l'ouest de la province de Liège. Ce dernier ensemble évacue la Belgique vers l'Allemagne en fin de nuit.

L'orage générateur des dégâts dus au vent dans la région de Florennes en début de nuit, vu depuis Dinant. A noter les bases nuageuses très hautes (auteur: Le Chroniqueur météo).

Localement, des rafales significatives ont été mesurées, concrétisant le potentiel venteux des orages qui avait été prévu. Sur le réseau officiel, on a relevé 94 km/h à Chièvres, 90 km/h à Uccle, 97 km/h à Zaventem et 130 km/h à Retie. Sur le réseau de Météo Belgique, on peut noter 81 km/h à Neufvilles et 92 km/h à Neder-Over-Heembeek. Côté français, le vent atteint 101 km/h à Méaulte, en Picardie. En raison de la rapidité de progression des orages, les précipitations ont été passagères; la plupart des cotes relevées par les pluviomètres sont inférieures à 20 mm. Voir aussi l'article de Belgorage à ce sujet.

Animation radar montrant les quatre salves orageuses. L'heure est en temps universel, ajouter deux heures pour avoir l'heure d'été réelle (source des images: Belgocontrol).

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Le 9 août en matinée et en début d'après-midi, plusieurs orages sont à nouveau observés en Belgique et sur le nord de la France. Le premier en début de matinée, remontant sur le nord-est de la France puis l'est de la Wallonie et les deux suivants, en milieu de journée, sur la province de Namur et l'est de la Flandre pour l'un, sur les provinces de Luxembourg et de Liège pour l'autre. L'activité électrique est par moments soutenue et des rafales significatives sont observées dans l'extrême sud du pays. Cette dégradation est cependant moins importante que ce qui avait été anticipé par les modèles, ceux-ci entrevoyant des orages plus généralisés et plus puissants.

Activité électrique observée entre minuit et 17h00 le 9 août (source: Lightningmaps).

Ces orages mettent fin à la très longue période de temps ensoleillé, sec et chaud que connaissait le pays depuis plusieurs semaines. La deuxième décade d'août est ainsi plus hésitante, avec quelques journées où les averses se montrent. Les températures oscillent entre 20 et 25°C l'après-midi.

Le 13 août voit un creux d'altitude apporter de nombreuses averses parfois orageuses. Ciel instable à Zeebrugge (source: IRM).

Les orages ont été particulièrement nombreux le 13 août, d'abord en début de matinée dans le sud au devant du front froid, puis dans l'après-midi dans la traîne très agitée. Certains foyers ont été particulièrement actifs et parfois accompagnés de fortes rafales, comme entre Gosselies et Les Bons Villers. Localement, les précipitations ont été assez abondantes, avec par exemple 37 mm de pluie à Ernage (entre 8h00 le 13 et 8h00 le 14).

Activité électrique observée le 13 août, les plus vieux impacts sont en rouge et les plus récents en jaune (source: Lightningmaps).

Nuit du 16 au 17 août: orages localement virulents

Août confirme le regain d'activité orageuse après un mois et demi relativement calme. Après une journée assez chaude (maximales de 25 à 28°C), un front froid s'est présenté sur le nord de la France par l'ouest. Malgré l'instabilité relativement faible, la présence d'une entrée droite du courant Jet et d'une anomalie basse de tropopause arrivant par l'ouest a rendu le contexte particulièrement dynamique et propice aux ascendances.

Analyse de surface du 17 août à 2h00 (source: KNMI).
 
Après quelques orages de faible intensité sur l'ouest de la Belgique et les Hauts de France en soirée, plusieurs cellules remontant sur la Thiérache s'intensifient rapidement en début de nuit sur l'Avesnois et entrent en Belgique par la Botte du Hainaut. L'écho en arc (ligne orageuse courbée) à tendance LEWP qui en résulte traverse rapidement les provinces de Namur et de Liège en milieu de nuit, s'accompagnant localement de violentes rafales descendantes responsables de nombreux dégâts dans l'Entre-Sambre-et-Meuse ainsi que dans les régions de Ciney, Havelange, Hamoir et Aywaille. Des grêlons de plusieurs centimètres de diamètre sont signalés tout au long de la trajectoire du système. L'activité électrique est quasiment ininterrompue.

La progression rapide des orages a limité l'importance des cotes pluviométriques. On relève 33 mm à Courrière et à Uccle. Aucune station n'a relevé de rafale significative, confirmant leur caractère local. 

Animation radar de 2h10 à 5h20 (source: Belgocontrol).

Voir aussi l'article de Belgorage à ce sujet.
 
Récit de l'orage:

1h30 du matin, le 17 août 2018. Après un somme en l'attente des premiers foyers, l'ouverture des cartes radar d'Infoclimat sonne l'alerte. Aux confins de l'Avesnois, un orage s'active. Et quel orage! Lightningmaps crépite à une cadence folle sous l'activité électrique ahurissante que délivre cet écho en arc à l'aspect menaçant.

Radar de précipitations à 1h40. Le point vert montre ma localisation à ce moment, en train de quitter Namur (source: Infoclimat).

Le matériel photo embarqué, direction Mettet, au sud-ouest de Namur. L'horizon ouest clignote lugubrement sous un plafond nuageux qui s'abaisse à la faveur d'un arcus, le temps que je me place sur un point de vue à l'est du village. Ciel stroboscopique et grondement diffus mais continu annoncent une grande claque. Il doit y avoir un sacré grabuge là-dessous...



Cela commence par quelques rafales, puis vient un vent violent et constant chargé des premières gouttes. Les lumières de Mettet disparaissent, et quelques secondes plus tard, la voiture se retrouve au sein d'un car-wash naturel, avec options discothèque et grêlons en prime. Une petite idée en vidéo de ce que ça donne (à regarder en plein écran):


Le radar de précipitations ci-dessous montre ma localisation près de Mettet lors du passage de l'orage (celui-ci se déplace d'ouest en est).

Source: Kachelmann Wetter

Cinq minutes plus tard, le coup de tabac se change en pluie régulière, et enfin quelques éclairs internuageux apparaissent sur l'arrière.



L'orage entraîne dans son sillage des nuages bas que met en perspective le bolide bardé d'éclairs. Après Mettet, dont le centre est inondé, c'est au tour d'Yvoir de déguster.



Un petit tour dans le coin montre que le vent a sans doute été encore plus fort ailleurs: des branches, voire des arbres entiers jonchent les routes, il est d'ailleurs préférable de ne pas rouler trop vite car leur brutale apparition dans le faisceau des phares est surprenante à plusieurs reprises. Les environs d'Ermeton-sur-Biert, quelques kilomètres au sud-est de mon point de vue, ont l'air d'avoir pris cher.




...Moins que ce que montreront les journaux télévisés du lendemain dans les régions de Beaumont et Walcourt, ainsi que de Hamoir. Des toits emportés et des arbres couchés par dizaines sous les effets d'un seul et même orage qui par ailleurs continue de s'éloigner vers l'est, cognant la région de Ciney et d'Havelange au passage, tandis qu'à l'horizon ouest-sud-ouest, quelques clignotements au sein d'un nouveau chou-fleur annoncent une seconde salve.

A l'instar de son prédécesseur, l'Avesnois et la Thiérache le dopent à la convection, et c'est un nouvel écho en arc qui vrombit au-dessus des campagnes de l'Entre-Sambre-et-Meuse peu avant 4h00 du matin. Activité électrique à peine moins forte, déluge qui oblige les pompiers occupés à tronçonner un arbre en travers de la chaussée un peu plus loin à se replier, mais cette fois un vent beaucoup plus modéré.

Le retour se fait progressivement vers Namur, sous une pluie modérée. Quelques éclairs annoncent un troisième orage plus au sud, vers Givet, mais j'ai eu ma dose d'émotions pour cette nuit. A 5h30, alors que le noir de la nuit fait place à l'heure bleue, il est temps d'aller dormir. Il y a une journée de travail à assumer dans quelques heures!

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La dernière décade du mois est beaucoup plus contrastée (malgré quelques journées encore chaudes).

A l'inverse du mois de juillet, le mois d'août a été normal (un peu plus chaud que la moyenne, normalement pluvieux et normalement ensoleillé). Par contre, il n'empêche pas l'été climatologique 2018 (juin-juillet-août) d'avoir été le plus chaud depuis le début des mesures à Uccle.