samedi 9 novembre 2013

Décembre 2010 - De la neige à ne plus savoir qu'en faire

Peut-être vous souvenez-vous de décembre 2010, cette période durant laquelle une grande partie de la Belgique avait été couverte de neige parfois pendant plus de 25 jours d'affilée... Si oui, vous avez une bonne mémoire. Si cela ne vous rappelle rien, cet article - assez long - vous propose un retour en arrière pour passer en revue ce qui restera pendant encore longtemps l'un des mois les plus extraordinaires pour les amateurs de neige... et sans doute l'un des plus compliqués pour les navetteurs. Un mois qui commencera doucement, ira crescendo avant de finir en apothéose la veille de Noël. Il vous est relaté sur base des observations personnelles de l'auteur, ce qu'il a vécu et les informations qu'il en a tiré. C'est pourquoi vous verrez souvent apparaître deux lieux: Montigny-le-Tilleul (près de Charleroi) et Namur. L'article s'épanche cependant sur toute la Belgique et les régions limitrophes.

L'automne 2010 avait déjà eu, à de maintes reprises, l'occasion de s'exprimer avec véhémence: des épisodes venteux à répétition, de la pluie en quantité, et surtout des inondations catastrophiques les 14 et 15 novembre. En fait, décembre 2010 ne fut qu'un mois parmi les autres qui ont vu le temps s'acharner avec courroux sur l'Europe Occidentale. A la seule différence que ce fut un mois blanc, très blanc.

Tout cela débute le 22 novembre 2010, lorsque le temps commence à devenir petit à petit hivernal. Un coup d’œil jeté à la carte ci-dessous nous montre le pourquoi. Un anticyclone sur le Groenland et une advection de hauts géopotentiels (zone jaune-orange marquant des anticyclones d'altitude) sur l'Atlantique font barrage au flux d'ouest classique. Une dépression sur l'Europe Centrale commence à amener de l'air de plus en plus frais vers nos régions. Ce jour, il tombe juste quelques flocons en province de Liège et du Luxembourg.

 
Le 25 novembre, il neige un peu partout en Belgique. Par endroit, on observe la formation d'une légère accumulation. La nuit suivante, il tombe entre 2 et 5 cm de neige en provinces de Liège et du Luxembourg. Le mois de décembre se prépare de manière très progressive.

Au matin du 28 novembre, les températures relevées sont relativement basses. On observe - 5,3°C à Montigny-le-Tilleul, - 4,6°C à Quaregnon, - 6,5°C à Melin, - 3,9°C à Floriffoux, - 7,4°C à Bovigny, - 10°C à Elsenborn, - 5,5°C à St-Libin, - 5,1°C à Virton-St-Mard et - 9,2°C à Brûly.

29 novembre

Le temps continue de rester froid, en raison d'un anticyclone situé sur l'Europe du Nord et deux dépressions prenant place sur l'Europe de l'est et au large de la péninsule ibérique. Une petite ligne de convergence arrivant d'Allemagne fusionne avec une zone neigeuse stationnant sur la Haute Belgique en fin de nuit et en matinée, avant de gagner vers le Centre en cours d'après-midi. Cela entraîne de faibles chutes de neige continues de plusieurs heures accompagnées de températures variant entre 0 et -5°C (Elsenborn). On observe entre 5 et 10 cm de neige en Lorraine, 3 cm à Bierset (Liège) et 1 à 2 cm à Namur et à Charleroi.


La citadelle de Namur sous la neige (auteur: Le Chroniqueur météo).

Le 30 novembre, le temps reste très froid et localement faiblement neigeux. Les températures minimales relevées sont de - 3,5°C à Floriffoux et - 5,8°C à Bovigny et au signal de Botrange. Ces températures n'évolueront que peu durant la journée, puisque au meilleur de celle-ci, on relève - 0,3°C à Floriffoux et - 4,5°C au signal de Botrange comme températures maximales.

1er décembre 

Ce premier jour de l'hiver météorologique est très froid et marque réellement le début de l'offensive du Général Hiver: les températures, déjà faibles au matin, baisseront encore en cours de journée. De l'air très froid en provenance de Sibérie envahit peu à peu nos régions. En fin d'après-midi, une zone neigeuse "surprise" se forme en travers de la Belgique (sur un axe Hautes-Fagnes - Brabant - côte) au niveau d'un front occlus et donne plusieurs centimètres de neige fraîche et poudreuse. Alors que ce premier front se déplace vers la Flandre en faiblissant, un deuxième se forme sur la province de Namur en fin de soirée, apportant de nouvelles chutes de neige.


La place de la station à Namur sous la neige en début de soirée (auteur: Le Chroniqueur météo).
 
On observe 3 à 4 cm supplémentaires à Namur et parfois jusqu'à 6 ou 7 cm par endroit, s'ajoutant à la couche de neige déjà tombée les jours précédents. Ces chutes de neige survenant sous des températures très basses (entre -5 et -9°C de manière générale) entraînent de gros embarras de circulation sur le réseau routier à l'heure de pointe: plus de 500 km de bouchons sont répertoriés. 

Cette perturbation s'accompagne d'un vent glacial de nord-est qui fait baisser la température ressentie à -15°C! Pour l'avoir vécu, la Saint-Nicolas des étudiants à Namur s'est déroulée sous un ciel sombre, neigeux et dans une froideur difficilement supportable, avec en prime de la "glace à la bière", le breuvage gelant à même le verre!


La carte ci-dessus donne les températures enregistrées par les stations de Météo Belgique en fin d'après-midi.

Le 2 décembre, il continue de neiger sur bon nombre de régions, suite à l'arrivée d'une nouvelle perturbation depuis la France, de moindre intensité que celle de la veille. Par endroits, la couche totale de neige accumulée dépasse les 10 cm. Dans le Namurois, l'épaisseur du manteau blanc est d'environ 5 cm. Les températures restent très basses: ainsi à Uccle, la température maximale observée pour ce jour est de -4,5°C.


La citadelle de Namur vue depuis le Grognon (auteur: Le Chroniqueur météo).
 
3 décembre

Les températures minimales relevées sont très basses. Une fois n'est pas coutume, la côte enregistre des valeurs inférieures à bon nombre de stations de l'intérieur du pays. On observe -13,0°C à Coxyde et Ostende. Ailleurs, on relève, -11,3°C à Botrange, -11,0°C à Gand, Anvers et Kleine-Brogel, -10,7°C à Courrières,-9,3°C à Montigny-le-Tilleul et -8,8°C à Floriffoux. Dans la soirée, les températures baissent à nouveau très fort.

4 décembre

La nuit a été à nouveau très froide avec par exemple - 9,2°C enregistré à Montigny-le-Tilleul. En fin de nuit, les températures entament une remontée suite à l'arrivée de courants maritimes: une perturbation en provenance de l'Atlantique génère de nouvelles chutes de neiges sur la Belgique dans l'après-midi, l'épisode dure une à deux heures. De l'air plus doux s'intercale en altitude, entraînant des pluies verglaçantes surtout sur l'ouest du pays. Sur Montigny, la perturbation dépose seulement 1 cm de neige, portant l'épaisseur totale de la couche à 4,5 cm. En Hautes-Fagnes, la couche de neige excède les 15 cm.

En soirée, une deuxième perturbation (durée: une heure) glisse rapidement à travers la Belgique du sud-ouest au nord-est: elle amène de la pluie et/ou de la neige fondante sur l'ouest du pays, et de la neige sur l'est. A Montigny, 1,5 cm se déposent, la couche de neige est maintenant de 6 cm.


Image radar de la deuxième perturbation à 17h00. Elle arrive seulement en Belgique. Ci-dessous, passage de la perturbation sur Montigny-le-Tilleul (auteur: Le Chroniqueur météo).



Plus tard dans la soirée, le front froid de la perturbation approche du pays, amenant de nouvelles précipitations. Mais de l'air doux circule devant lui, ce qui entraîne des pluies sur beaucoup de régions du pays, elles sont accompagnées par un dégel marqué. La couche de neige fond en de nombreux endroits. 

5 décembre - Premier gros épisode neigeux

En début de matinée, alors que le front froid reste bloqué sur le pays, l'arrivée d'air froid en altitude permet à la pluie de se changer à nouveau en neige au-dessus de 100 mètres d'altitude (où les températures sont comprises entre -2 et +1°C). Il neige donc sur une bonne partie de la Wallonie, excepté sur le Hainaut occidental et l'ouest du Brabant Wallon. La neige ne va cesser de s'accumuler tout au long de la matinée.


Image radar du front froid le 5 décembre à 8h45. Ci-dessous, analyse de surface pour le même jour à 1h00 heure belge.



Sur le temps de midi, l'intensité des précipitations hivernales tend à faiblir quelque peu sur la région de Charleroi, la perturbation se déplaçant lentement vers le sud-est en gagnant l'Ardenne. La situation sur les routes devient difficile, le réseau secondaire restant complètement enneigé. Même les routes nationales ne sont pas sûres...


Auteur: Le Chroniqueur météo.

Au final, cette perturbation aura apporté 10 à 20 cm de neige supplémentaires. Ajoutés au manteau de neige préexistant, la couche de neige atteint des épaisseurs impressionnantes:
- A Montigny-le-Tilleul, où la quasi-totalité de la couche de neige des jours précédents avait fondu durant la nuit, on observe 13 cm de neige à la fin de l'épisode.
- Dans le Namurois ainsi que dans les Hautes-Fagnes, on observe environ 30 cm de neige.
- Mais c'est le sud de l'Entre-Sambre-et-Meuse qui collecte les plus grosses épaisseurs de neige: on y observe une accumulation comprise entre 20 et 40 cm.


Voici les observations que l'auteur de l'article postait ce jour-là sur Météo Alerte.
 
6 décembre

Dans la nuit du 5 au 6, il continue de neiger sur le sud du pays. Ailleurs, le temps se dégage, de l'air polaire envahit nos régions en altitude, et la nuit se fait froide: on relève -4,5°C à Montigny-le-Tilleul. Il ne dégèle pas de la journée, permettant à la couche de neige de persister.
 
7 décembre

La nuit est froide sur le pays de Herve (-6,8°C à Mortroux) et dans le Condroz (-9,1°C à Pessoux). Ailleurs, les températures minimales oscillent entre -2 et -5°C.
 
8 décembre

Une perturbation arrivant de France concerne le sud du pays et donne parfois près de 10 cm de neige. Temporairement, cette neige se transforme en pluie verglaçante et provoque de gros embarras de circulation. Le veille au soir et la nuit qui suit, l'Ile-de-France est durement touchée par ces chutes de neige, entraînant une situation apocalyptique sur les routes.
 
10-12 décembre

Les températures remontent parfois jusqu'à +5°C pendant ces trois jours. La couche de neige fond en de nombreux endroits. L'anticyclone présent depuis plusieurs jours sur l'Atlantique a fait un pas de côté vers l'ouest de la France, permettant à des courants maritimes plus doux d'arriver jusqu'à nous, mais pas pour très longtemps... 

13 décembre

L'hiver est de retour sur la Belgique. L'anticyclone français est devenu anglais, et de l'air polaire direct atteint le pays. La nuit est froide: on observe comme températures minimales les valeurs suivantes: -9,9°C au signal de Botrange, -9,8°C à Bovigny, -6,3°C à Limelette, -6,0°C à Virton-St-Mard et -5,7°C à Floriffoux.

16 décembre - brèves mais très fortes averses de neige

Une perturbation descend du nord, accompagnée de fortes précipitations et d'air un peu plus doux en altitude. Il pleut en basse et moyenne Belgique, mais il neige fortement en Haute Belgique où une alerte rouge est déclenchée par l'IRM et Météo Belgique. De l'air très froid en altitude suit immédiatement la perturbation (-8 à -9°C à 1500 mètres d'altitude contre -2 dans le cœur de la perturbation) et est rabattu vers le sol par les précipitations, amplifiant le front froid et le rendant très intense: le neige arrive brutalement sur le nord du pays vers 17h00, sur Bruxelles vers 18h00 et sur Namur peu après 19h00. Sur Namur et ses environs, un orage de neige déclenche une véritable tempête de neige d'environ 15 minutes. L'intensité diminue un peu par après. Le front froid est très marqué: à Namur, la température passe de 2,5°C à -0,5°C en une vingtaine de minutes.


Carte d'analyse de surface à 13h00: le front froid, suivi par une déferlante d'air polaire, est aux portes du pays (source: Met Office). 

Au final, ce sont 3 à 4 cm de neige qui se déposent sur bon nombre de régions (notamment à Namur et à Charleroi), mais parfois 15 à 20 cm en certains points de la Haute Belgique.


Le Grognon et le parlement wallon (en arrière plan) sous la neige à Namur (auteur: Le Chroniqueur météo). 
 
17 décembre

En soirée, une nouvelle perturbation arrive de France (elle a donné parfois 15 cm de neige en Normandie) et dépose 3 à 4 cm de neige supplémentaires sous des températures très froides (avoisinant les -5°C).
 
18 décembre

En soirée, une troisième perturbation arrive de France et donne 5 à 10 cm de neige en Ardenne. A Montigny-le-Tilleul, il tombe seulement 1 cm, portant la couche de neige totale à 7 cm. D'autre part, l'IRM annonce qu'un record a été battu: depuis le début du mois, on a observé 18 jours de neige à Uccle. Jamais ce nombre n'a été atteint depuis que les observations météo existent à Uccle. 

19 décembre - deuxième gros épisode neigeux

Tout juste deux semaines après l'épisode du 5 décembre, la Belgique fait une nouvelle fois face aux intempéries. Une dépression de tempête (110 à 120 km/h sur les côtes ouest françaises) se dirige de la Bretagne vers le Luxembourg. Elle véhicule une impressionnante et intense perturbation qui provoque de très fortes chutes de neige sur le nord de la France, la Belgique, le Luxembourg et l'Allemagne qui restent dans la partie froide de la dépression. (Ci-dessous, carte d'analyse de surface à 13h00 heure belge, source Met Office).



Cette perturbation entre en Belgique vers 10h00 sous forme d'un front chaud. La neige se dépose rapidement sur l'accumulation préexistante, et enneige le réseau routier. Les aéroports belges ferment les uns après les autres, bloquant des milliers de passagers.

La perturbation est énorme, comme le montre l'image radar suivante. Pendant le début de l'après-midi, c'est le front chaud qui concerne la Belgique, avec des intensités parfois soutenues:



En milieu d'après-midi, la circulation routière devient très difficile à tel point que les services d'épandage sont dépassés. Les bus du TEC rentrent aux dépôts les uns après les autres. Les routes sont enneigées et très dangereuses. La couche de neige devient par endroit impressionnante. Ci-dessous, une image d'ensemble de la perturbation à 14h30.



Plus l'heure avance, plus la neige s'accumule, et plus la situation sur les routes devient apocalyptique: à 17h00, on répertorie plus de 500 km de bouchons, ce qui est exceptionnel pour un dimanche. Nul doute que si cet épisode s'était produit en semaine, ce chiffre aurait été plus élevé encore. La carte suivante venant du site Infoclimat/Météo Alerte montre la situation en fin d'après-midi, avec les observations encodées par l'auteur de l'article, tout au long de la journée:



En fin d'après-midi, la zone neigeuse s'éloigne vers l'est après avoir déposé entre 10 et 20 cm de neige selon les régions, et l'influence du secteur chaud de la perturbation se fait sentir: les températures entament une remontée fulgurante, et le dégel s'amorce partout au sud d'une ligne Mons - Liège. En Gaume, il fait jusqu'à 4°C! La couche de neige commence à fondre en de nombreux endroits, et l'on observe de la pluie.

Mais c'est sans compter sur l'arrivée du front froid plus tard en soirée. Celui-ci s'accompagne d'une nouvelle zone de neige soutenue, précédée d'un peu de pluie et même d'orages (signalés à Dinant et Ciney). Cette zone suit le sillon Sambre-et-Meuse, et marque la frontière entre l'air froid au nord et l'air chaud au sud. Les températures redescendent rapidement sous la barre des 0°C sous les chutes de neige.



La neige gagne à nouveau en épaisseur et les conditions routières se font encore plus difficiles. Cette deuxième salve dure entre trois et quatre heures selon les endroits et dépose à nouveau 5 à 10 cm de neige en plus sur le sillon Sambre-et-Meuse.

Mais si la neige cause pagailles et soucis, elle offre également de magnifiques paysages. Montigny-le-Tilleul est à ce titre très bien servi.






Auteur: Le Chroniqueur météo.

Cela est par contre beaucoup moins gai sur le réseau routier national...


Auteur: Le Chroniqueur météo.
 
L'Ardenne prend des airs de Laponie ou de Sibérie, comme ici à Vresse-sur-Semois (photo: R. Courtois):



A Montigny-le-Tilleul, les événements peuvent être résumés comme suit: avant l'arrivée de la perturbation, on observe 7 cm de neige. Le passage du front chaud donne 14 cm de neige, ce qui porte la couche totale à 20 cm. Un dégel de deux heures ramène l'épaisseur à 18,5 cm. Le front froid apporte 7 cm supplémentaires. Il est donc tombé 20 cm de neige sur tout l'épisode. La couche totale de neige est comprise entre 25 et 26 cm.

Namur reçoit une vingtaine de centimètres de neige, parfois une trentaine dans sa périphérie (voir ici de très belles photos de la citadelle enneigée: Neige Namur). En Ardenne, l'épaisseur du manteau neigeux avoisine les 40 à 60 cm selon les endroits, et atteint même 70 cm en Hautes Fagnes. 
 
20 décembre

Les chutes de neige se sont arrêtées, mais les ennuis continuent. A l'heure de pointe matinale, on relève 670 km de bouchons sur les routes rendues dangereuses par le verglas. Il ne dégèle pas de la journée. 

Auteur: Le Chroniqueur météo.

Toute l'Europe Occidentale vit au rythme des chutes de neige. En plus de la Belgique, le nord de la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et le Royaume-Uni sont également concernés. 

21 décembre

Il tombe à nouveau plusieurs centimètres de neige sur Bruxelles et le Brabant Wallon, un peu moins ailleurs. Les routes restent très dangereuses sur tout le pays. Heureusement, le dégel commence, et la situation s'améliore dans l'après-midi.

22 décembre

La situation commence à nouveau à se compliquer et devient assez étrange. Alors que l'air froid envahit une nouvelle fois la Basse et la Moyenne Belgique avec des températures de ou sous 0°C, un dégel assez conséquent se manifeste en Haute Belgique. Ainsi, on observe de la pluie en bonne quantité à Spa, mais aussi temporairement à Bierset. Cependant, une baisse progressive des températures amène le thermomètre à 0°C, entraînant des pluies verglaçantes.

Au fil de la journée, la perturbation progresse vers le nord-ouest, et vient se heurter à de l'air bien froid à tous les étages: il neige ainsi à Zaventem et à Gosselies, alors que l'on observe de la pluie (verglaçante) respectivement à Beauvechain et à Florennes, de manière temporaire. Cela montre bien que la limite du dégel en altitude se trouve alors le long d'une ligne Campine - Entre-Sambre-et-Meuse. Tout cela se rapproche de Montigny-le-Tilleul, mais les précipitations y restent bien de neige. Elles apportent une couche supplémentaire de 4 cm, soit une épaisseur totale de 16 cm.

La carte ci-dessous résume clairement la situation atmosphérique. Une vaste dépression située sur l'Espagne puis en Méditerranée envoie de l'air doux en direction de la Belgique où il entre en collision avec de l'air polaire en provenance de Scandinavie. Au contact entre les masses d'air se forme un puissant front chaud (certaines cartes le représentent comme un front double). Il va stationner sur la Belgique pendant environ 36 heures.


Source: Met Office

23 et 24 décembre - Troisième gros épisode neigeux + pluies verglaçantes = pagaille monstre

Durant la matinée du 23, le front chaud joue au yoyo et se rétracte sur le sud de la Belgique. Le contraste de températures devient encore plus important en altitude, renforçant l'activité du front. Une nouvelle pulsion d'air chaud venant de Méditerranée le renvoie lentement vers le centre de la Belgique, où il va s'arrêter pour plusieurs heures, et entraîner de fortes précipitations hivernales. La carte ci-dessous représente la situation à 19h00, et montre toujours ce puissant front chaud pratiquement immobile.

Source: Met Office. 

A ce moment-là, la perturbation est déjà bien calée au-dessus de la Belgique. Il neige en abondance sur le centre et l'est du pays. Dans le sud, la stagnation d'air plus doux en altitude maintient la pluie, qui tombe sur des sols gelés (-2 à -3°C, voir même -5°C comme à Saint-Hubert vers 17h-18h!). Ceci entraîne l'apparition d'un épais verglas. De temps à autre, un intermède neigeux survient, mais très vite, la pluie reprend le dessus. La couche de glace mesure plusieurs centimètres. On note 1380 km de bouchons sur les routes belges à l'heure de pointe vespérale. Les bus du TEC rentrent une nouvelle fois aux dépôts et les vols au départ des aéroports de Charleroi et de Liège sont retardés voire supprimés. Bruxelles suivra plus tard. La ligne SNCB Namur - Luxembourg est fermée à tout trafic suite à une rupture de l'alimentation électrique à Libramont, les trains venant de Bruxelles sont limités à Jemelle.


A Montigny-le-Tilleul, la RN 579 est déserte et enneigée (auteur: Le Chroniqueur météo).

Les deux images radars ci-dessous, enregistrées à trois heures d'intervalle, montrent l'immobilisme de la perturbation:





Dans le courant de la nuit du 23 au 24 décembre, l'intensité des précipitations faiblit. En altitude, l'air froid commence à se répandre vers le sud-est. Les pluies verglaçantes qui concernaient le sud du pays sont remplacées par de la neige. La perturbation se déplace lentement vers l'Allemagne et la France. Au niveau de la situation synoptique, le front chaud commence à faiblir, comme montré sur la carte ci-dessous (à 1h00 le 24):

Source: KNMI 

Au matin du 24, il neige toujours en de nombreuses régions, mais plus faiblement, excepté sur l'Ardenne et les Hautes-Fagnes. De fortes rafales de vent entraînent la formation de congères.

A l'heure de pointe matinale, la situation sur les routes est catastrophique: plus de 500 km de bouchons sont répertoriés, en prenant en considération que beaucoup de travailleurs sont restés chez eux. A nouveau, aucun bus du TEC ne sort des dépôts, et la circulation des trams à Charleroi et à Bruxelles est très perturbée. La situation se normalise lentement dans l'après-midi avec l'arrêt des chutes de neige sur le centre du pays.

La perturbation quitte le sud de la Belgique en soirée, après avoir apporté 15 à 25 cm de neige sur les régions les plus touchées (Hainaut oriental, Namur et à l'ouest de Liège surtout). Si ces quantités sont remarquables, c'est surtout l'épaisseur de la couche de neige totale qui frappe l'imaginaire: elle va de 20 cm à Bruxelles à 60-70 cm en Hautes Fagnes, en passant par 25 à 35 cm dans la région de Charleroi (officiellement 25 cm à Gosselies, dont 13 tombés pendant cet épisode) et Liège (officiellement 32 cm à Bierset), 40 à 50 cm en Entre-Sambre-et-Meuse et dans le Condroz (à Florennes, le vent a formé des congères, empêchant une mesure exacte). Ce ne sont que des exemples parmi tant d'autres.

A Montigny-le-Tilleul, la couche de neige au 22 au soir était de 12 cm. Durant la nuit du 22 au 23, il est tombé 4 cm, portant la couche de neige totale à 16 cm. Entre midi le 23 et minuit le 24, la neige tombe abondamment, puis faiblit jusqu'à s'arrêter complètement en milieu d'après-midi. Il est tombé 20 cm de neige durant cet épisode, portant la couche de neige totale à 36 cm.




36 cm de neige sur Montigny-le-Tilleul au matin du 24 (auteur: Le Chroniqueur météo).


Il y avait une rue à cet endroit... (auteur: Le Chroniqueur météo).


Quelques courageux tentent de rejoindre leur lieu de travail. Beaucoup renoncent après quelques centaines de mètres (auteur: Le Chroniqueur météo).


Normal en Haute Belgique, mais stupéfiant dans la région de Charleroi (auteur: Le Chroniqueur météo). 

25 décembre

La neige offre à la Belgique le plus beau Noël blanc qu'elle n'ait jamais eu depuis 1964: 16 cm de neige mesurés à Uccle, encore plus de 30 cm à Montigny-le-Tilleul (la neige s'est tassée pendant la nuit). En soirée, les températures chutent: il fait -10,4°C à Montigny-le-Tilleul vers 18h00, le temps se "radoucit" par la suite.

Fin décembre - début janvier

La neige persiste pendant les jours suivants. Il en faudra plusieurs pour que tout rentre dans l'ordre sur les routes et le rail, et de nouvelles faibles chutes de neige et du verglas perturbent à plusieurs reprises l'heure de pointe, mais moins que le 24 décembre.

Ce mois de décembre 2010 restera longtemps comme celui qui a complètement pété les plombs en mode hiver. Les décrochages récurrents d'un vortex polaire instable et baladeur en direction de l'Europe y sont pour beaucoup. Pendant une bonne partie de ce mois, le front polaire sera systématiquement repoussé au sud de nos régions, alors qu'il a plutôt tendance à se retrouver au nord de celles-ci. Ceci est responsable d'un déficit thermique très exceptionnel si on considère comme normale la moyenne 1971-2000. A Uccle, ce déficit a atteint -4,8°C.


Écarts des températures moyennes mensuelles par rapport aux normales (1981-2010). 

Cet article a été repris des chroniques que je publie sur Hydrométéo et retravaillé pour Info Météo et Le Chroniqueur météo.

Sources: Wetterzentrale, Meteox, Météo Belgique, Météo Services, IRM, photos personnelles...