dimanche 16 novembre 2014

Eté 2003 : retour vers le futur ?


L'été 2003 est et restera pendant longtemps la référence en matière de vague de chaleur et de températures extrêmes, à tel point qu'il a laissé dans notre mémoire collective une trace indélébile. Nous en voulons pour preuve chaque allusion que la population peut faire lorsque des journées estivales virent à la canicule. Bon nombre espèrent ainsi « ne pas revivre l'enfer de 2003 », à juste titre car il a provoqué la mort, au moins indirecte, de dizaines de milliers de personnes, principalement âgées. Durant le printemps, le même genre de réflexions est émise, surtout si les modèles saisonniers entrevoient une configuration propice à un été chaud. Il nous a paru intéressant de revenir sur cet événement qui frappa les imaginations. Nombre d'articles ont déjà été publiés sur cette période, et notre but ici n'est pas de faire des rappels statistiques uniquement pour le plaisir des chiffres, mais avant tout pour ré-analyser la position synoptique des grandes centres d'action et tenter ainsi d'apporter un nouvel éclairage sur cet été infernal.

samedi 15 novembre 2014

30 novembre 1993, fin épique d'un novembre atypique


Le mois de novembre 1993 fut caractérisé par un début très doux avec une température de 18° à Uccle le 4 novembre. A partir de la mi-novembre, un anticyclone russo-scandinave s'installa et organisa un flux d'Est sur l'Europe Occidentale. Le 22 novembre, on enregistre -1.3° de température maximale à Uccle après une nuit à -4.8°. De plus, de la neige accompagne ce gel permanent. Après un redoux le 25 et 26 novembre, le gel permanent se réinstalle du 27 au 30 novembre avec respectivement 0.0, -2.6, -0.6, et -0.4 à Uccle.

Le 29 novembre au soir, André Schevers, alors présentateur de la météo à la RTBF, annonce l'arrivée d'une perturbation de dégel pour le lendemain. La pluie verglaçante est mentionnée. Elle sera suivie de pluie purement liquide qui devrait nettoyer le réseau routier en soirée. Le lendemain, les premiers phénomènes verglaçants sont observés en début d'après-midi sur la région de Wavre. A 14h30, dans la cour de récréation (j'avais 16 ans à cette époque), il tombe ... des billes, signe que l'air doux (+2°) producteur de la pluie à environ 1000m d'altitude est engagé dans une lutte à mort avec l'air froid de sol (-1°) qui recongèle la pluie.

Et puis, brusquement, alors que rien de tout cela n'avait été prévu, la neige, la vraie neige, remplace les billes. S'installe alors un rouleau de glace surmonté d'une fine pellicule blanche. C'est le début de la pagaille. A 15h45, mon professeur de maths, voyant le chaos routier dans le centre de Wavre, décide d'abréger le cours. Je retourne chez moi en train, puis à pied dans 10cms de neige, ma mère étant aussi piégée par cette surprise hivernale et ne pouvant pas venir me chercher à la gare. Je suis terriblement excité. Cette excitation se transforma en émerveillement le soir lorsque André Schevers signala que l'anticyclone russe avait décidé de montrer quelques signes de caprice et stoppa, fit reculer la perturbation de 40 kilomètres, pour finalement céder. C'est tout un axe Amsterdam-Bruxelles-Paris qui se fit piéger dans cette lutte titanesque entre l'air froid et l'air doux, comme l'indique la carte ci-jointe.

Liège ne vit rien de tout cela. Et le plus incroyable, c'est que non seulement ces 40 kilomètres sont invisibles sur une carte frontale, mais qu'en plus, les supercalculateurs d'aujourd'hui ne pourraient toujours pas prévoir ce changement de scénario (merci à Robert V. pour ces précisions à ce sujet).




La météorologie est une passion pour moi depuis plus de 25 ans, mais ce jour-là cristallise finalement toute l'excitation et tout l'émerveillement que je ressens. Il m'a montré qu'il se passe des choses insoupçonnables au-dessus de nos têtes et que nous ne pourrons jamais prévoir.

Au final, novembre 1993 sera clôturé avec une température moyenne de 2.8°, soit 4° en-dessous de la normale actuelle, devenant ainsi le mois de novembre le plus froid depuis 1981 !